Récit accouchement d'Ève
Nous sommes le 28 juillet 2011. Cela fait maintenant 40 semaines et un jour que nous attendons ta venue! Tu te fais désirer et nous avons si hâte que tu décides enfin de venir nous rejoindre mon bébé.
À 10h45, ton papa et moi rencontrons le dr. Gagnon, car le dr. Guillemette est en vacances. Elle vérifie le travail et je suis toujours effacée à 60% et dilatée à 2.5 cm. Elle me propose alors de me faire un décollement des membranes que j’accepte, même si celui de la semaine dernière n’a pas fonctionné. Dr. Gagnon blague que les siens sont meilleurs que ceux du dr. Guillemette, ce que j’espère secrètement au fond de mon cœur.
À 00h00, je me réveille. Ça contracte enfin! Un énorme bonheur m’envahie, mais je crains aussi que ça ne soit encore que du faux travail.
1h30, j’ai toujours des vagues. Je vais réveiller ton papa afin qu’il calcule la fréquence et je saute dans le bain. 5-3-6-4 minutes. Je dois respirer chacune de ces vagues et je te dis : ‘vient-en mon bébé, je t'attend, maman est prête!’
À 2h15 papa met la valise dans la voiture et nous partons pour l’hôpital. Les vagues se font maintenant sentir aux 3 minutes. Je regarde la route que nous empruntons en me disant que la prochaine fois que je passerai ici, nous serons 3! Je téléphone à grand-maman Aline entre deux vagues afin de lui dire que c’est le bon moment, tu arrives enfin!
Il est presque 3h00 quand nous arrivons à la maternité. C’est alors que je rencontre l’ange gardien qui prendra soins de nous durant le reste de l'accouchement. Elle nous installe afin de vérifier le travail, mais je ne veux pas me coucher, je dois prendre les vagues debout et marcher entre chacune. Je prend mon courage.. elle vérifie et prononce ces mots magiques :‘ 4 cm et la poche bien bombée. nous te gardons, ton bébé s’en vient!’
Elle me demande alors si je veux la péridurale et je lui répond que non, je veux un accouchement naturel! C’est à partir de ce moment qu’elle me laisse vivre mon accouchement tout en restant présente en cas de besoin. Puisqu’il y a beaucoup de bébés qui ont décidés d’arriver en même temps que toi et que je contrôle très bien mes vagues, elle me garde près d’elle dans la salle d’évaluation le temps qu’une chambre se libère.
À 4h45, le résidant vient annoncer qu’une chambre est prête et il vérifie le travail : 7 cm! Maman est très heureuse de cette bonne nouvelle, nous traversons dans la chambre de travail. J’ai de plus en plus mal, il y a un ballon rempli d’eau qui veut sortir de mon corps! J’ai la sensation qu’il va éclater à chaque 2 minutes. Je respire et grogne en harmonie avec cette douleur si cruelle, qui prépare mon corps à vivre le moment le plus merveilleux et exceptionnel de ma vie! Je me répète que tu arriveras bientôt et cela me donne des forces.
6h00, le travail n’a pas avancé, toujours à 7 cm. Le résident veut rompre mes membranes, mais mon ange dit : ‘non, c’est un accouchement naturel et tu ne touches pas à ses membranes. Elles vont rompre seules.’ Je veux prendre un bain tourbillon, je veux bouger, je veux que papa me masse et puis non. je ne sais plus ce que je veux. Je veux arrêter de sentir ce ballon ingrat gonfler, prêt à exploser dans mon corps.
6h30, je suis dans le bain tourbillon. Oh, ce ballon est très tenace et il veut toujours sortir, mais il ne peut pas, il est trop gros pour le passage que mon corps lui offre. Je me soulève comme je peux afin de calmer cette douleur et je visualise mon corps lui faire plus de place et mon passage s'ouvrir afin que tu puisses descendre. Je veux laisser éclater ce ballon, mais en même temps j’ai peur. Je veux garder en moi ce ballon remplie d’eau, il y est depuis 9 mois et fait maintenant parti de moi!
C’est assez, je dis à papa que je veux retourner dans la chambre de travail. J’ajoute avec tristesse que si je suis toujours à 7 cm je pense à prendre la péridurale, car je ne suis plus capable de supporter le poids de ce gros ballon.
7h15, le résident vient vérifier le travail. Quel soulagement, je suis maintenant à 9 cm. Il me propose encore de rompre les membranes et je ne sais plus quoi faire. Tu n’as pas le droit à la péridurale toi, mais j’ai si peur de la douleur si le résident fait éclater ce ballon. C’est alors que mon ange chante encore : ‘c’est un accouchement naturel, tu laisses les membranes rompre seules!’ Cela me donne le courage de continuer, pour toi mon bébé!
À 8h00, mon ange doit laisser sa remplaçante prendre la relève pour aller se reposer. Par chance elle est aussi gentille que la première! Le ballon veut toujours éclater dans mon ventre, mais je contrôle maintenant mieux cette douleur. Je ne grogne plus, mais dois toujours me lever afin d’essayer de calmer ce poids qui pousse pousse dans mes fesses.
À 8h45, je suis enfin complète et je sens le besoin de pousser. On m’installe et après quelques poussées, je sens quelque chose éclater à l’intérieur de moi. Le ballon a décidé de se libérer de son poids, il s’est rompu seul. Le liquide chaud qui remplissait ta maison durant ces 40 dernières semaines coule entre mes cuisses et partout sur le lit.
Je te sens enfin mon bébé, tu veux descendre! Quelle sensation, j’ai peur et je suis excitée en même temps. Je dois inspirer et pousser pour nous deux, mais je n’ai plus de souffle. L’air qui entre brule vivement mes poumons, mais je dois faire ce dernier effort pour toi mon bébé. On me dit de pousser jusqu’au bout de cette douleur, ce que je fais.
La résidente arrive et dit : ‘ ohh regarde papa, on voit la tête!’ Elle place un miroir et on peut voir que tu n’as pas beaucoup de cheveux. Je vois ta tête de plus en plus et ça m’encourage, ça me donne de la force. Elle s’installe pour l’accouchement, car le dr. Camiré est occupé avec une autre maman. Bientôt tu seras avec nous toi aussi.
Je demande d'avoir des débarbouillettes d’eau chaude entre les poussées. Sens-tu la chaleur sur ta petite tête mon bébé? Ça fait du bien à maman, c’est certain.
Finalement le dr. Camiré arrive. Tout le monde m’encourage à pousser fort, ils savent que c’est maintenant une question de poussées avant que tu ne vois le jour. Mais voilà que je panique, je sais au fond de mon cœur que c’est l’une des dernières. Je pousse fort et je retiens, je ne sais plus s’il me reste assez de courage. Je veux encore te garder pour moi toute seule. Mais voilà que sous les encouragements, une force nouvelle apparait et je pousse le plus fort que je peux. Je suis maintenant prête à te partager avec le reste du monde.
Le 29 juillet 2011 à 9h23, en larmes, j’accueille enfin mon bébé tant attendu. Tu es si belle!
Bienvenue parmi nous ma Ève! Je t’aime plus que tout pour toujours.
Guylaine Perrin